Expertises connexes

Le contrat de travail est soit à durée déterminée ou indéterminée1. A priori, celui-ci est présumé être d’une durée illimitée, sauf preuve du contraire2. Par ailleurs, les normes du travail applicables au contrat d’emploi ainsi que les droits et obligations des employeurs et salariés sont déterminés en fonction de la nature du contrat de travail – d’où l’importance de bien identifier celle-ci.

Généralités sur le contrat de travail à durée déterminée

Le contrat de travail à durée déterminée est celui par lequel les parties fixent une échéance à leur relation contractuelle en prévoyant un terme extinctif ou une condition résolutoire.

Premièrement, en ce qui concerne le terme extinctif, il peut s’agir de la fixation d’une date d’échéance précise au contrat ou la survenance d’un événement certain, mais à une date inconnue3. À titre d’exemple, un contrat de travail est à durée déterminée s’il prévoit l’embauche d’un salarié pour une durée de deux ans, soit du 3 octobre 2020 au 3 octobre 2022. En effet, ce contrat prévoit un terme extinctif et ce faisant, le salarié connaît la durée exacte de son engagement à l’égard de son employeur. Le contrat de travail est aussi à durée déterminée lorsque, sans connaître la durée exacte de son engagement, le salarié est engagé pour une tâche ou un travail précis et déterminé. Ce serait le cas d’un salarié qui est embauché pour nettoyer les fenêtres d’un immeuble. Effectivement, le salarié sait que son contrat de travail prendra fin lorsqu’il aura terminé de nettoyer les fenêtres de cet immeuble, sans connaître la date exacte correspondant à la fin de son contrat.

Deuxièmement, pour ce qui est de la condition résolutoire, c’est celle par laquelle les parties prévoient la fin du contrat dans l’éventualité où survient un événement incertain comme la destruction de l’équipement de production.

Considérant que le contrat de travail est présumé à durée indéterminée, la personne qui allègue l’existence d’un contrat de travail à durée déterminée a le fardeau d’en établir la preuve4. De plus, le contrat de travail à durée déterminée doit faire l’objet d’une entente expresse, qu’elle soit écrite ou verbale5. En effet, pour conclure à l’existence d’un tel contrat, l’intention commune des parties doit être claire et non équivoque6.

La fin du contrat de travail à durée déterminée

Le contrat de travail à durée déterminée lie les parties jusqu’à son échéance 7. Il se termine automatiquement à l’arrivée du terme, et ce, de plein droit et sans avis 8.

Par ailleurs, lorsqu’après l’arrivée du terme, le salarié continue d’effectuer son travail durant cinq (5) jours sans opposition de la part de l’employeur, le contrat de travail est reconduit tacitement, et ce, pour une durée indéterminée 9. Le cas échéant, lors de la fin du contrat, l’employeur devra se conformer aux mesures de protection de l’emploi applicables en matière d’avis de cessation d’emploi ou de démonstration de motifs justes et suffisants 10. Pour en savoir plus sur les principes généraux applicables en matière de préavis de départ, nous vous invitons à lire la publication « Préavis de démission » : un employeur débouté et la Cour d’appel renversée.

Congédiement ou non-renouvellement du contrat de travail

Le non-renouvellement d’un contrat de travail à durée déterminée ne constitue pas un congédiement, sauf si le salarié avait une expectative légitime de voir son contrat renouvelé 11.

Pour déterminer si une telle expectative existe, le critère à retenir est le suivant : il faut se demander « si, hormis l’existence de conditions économiques négatives ou d’une cause juste et suffisante de ne pas renouveler, l’employé pouvait ici s’attendre à ce que son contrat d’emploi soit renouvelé »12.

Par ailleurs, divers facteurs sont susceptibles de créer une expectative légitime de renouvellement d’un contrat de travail. Les tribunaux ont identifié, notamment mais non limitativement, la relation et l’intention des parties, le comportement des parties au cours de leur relation et le caractère informel des renouvellements 13. De la même manière, la succession ininterrompue de contrats de travail à durée déterminée pourrait générer une expectative légitime de renouvellement d’un contrat de travail14. À titre d’exemple, dans l’afaire Atwater Badminton and Squash Club Inc. c. Morgan, la Cour d’appel a conclu que le renouvellement successif de contrats de travail à durée déterminée pendant dix-sept (17) années témoigne d’un lien contractuel indéterminé entre les parties15.

En outre, le non-renouvellement du contrat de travail d’un employé qui avait des expectatives raisonnables de voir son contrat renouvelé peut dès lors constituer un congédiement. Le cas échéant, le non-renouvellement du contrat de travail équivaut à la cessation d’un contrat à durée indéterminée et donc, à un licenciement ou à un congédiement16. L’employé bénéficiera alors des recours prévus en ces cas17. Toutefois, ce n’est pas tout renouvellement de contrat de travail à durée déterminée qui provoque la transformation de celui-ci en contrat à durée indéterminée. Il convient d’examiner les circonstances de l’espèce.

Également, il est à noter que la théorie de l’expectative légitime de renouvellement de contrat connaît une importante exception. En effet, elle ne s’applique pas lorsque le contrat d’emploi est assujetti à l’approbation d’un conseil municipal. Ce principe a été clairement établi par la Cour d’appel18 dans la décision Leduc c. Montréal (Ville de) et réaffirmé à de nombreuses reprises par les tribunaux19.

Bref, la qualification de la nature du contrat de travail est importante, car elle détermine les droits et obligations des employeurs et salariés – notamment en contexte de fin d’emploi. Par exemple, la fin d’un contrat de travail à durée déterminée, contrairement à celui à durée indéterminée, ne donne pas droit à l’employé à une indemnité tenant lieu de délai de congé20.

Pour connaître vos droits et obligations en matière de non-renouvellement d’un contrat de travail, n’hésitez pas à communiquer avec l’équipe de Bernier Fournier afin d’être adéquatement conseillé.

 

1 Code civil du Québec, RLRQ, c. CCQ-1991, (ci-après « C.c.Q. »), art. 2085 et 2086.

2 Boies c. Graphiscan Info-couleur Inc., 2011 QCCS 6213.

3 Ricard c. Melilo, 2013 QCCQ 11755.

4 Commission des normes du travail c. IEC Holden inc., 2014 QCCA 1538.

5 Marcotte c. 9126-4333 Québec inc.2012 QCCQ 4390.

6 Administration portuaire de Québec c. Fortin, 2017 QCCA 315.

7 Savoie c. Roy, EYB 1983-142321 (C.A.).

8 Art. 1517 et 1671 C.c.Q.; Morin c. Langlois, 2001 CanLII 39770 (QC CS).

9 Art. 2090 C.c.Q.

10 Loi sur les normes du travail, RLRQ, c. N-1.1, (ci-après « LNT »), art. 82 et 124.

11 Dorgebray c. Noorts, 2010 QCCS 179; Hudon c. Alma (Ville d’), 1987 CanLII 6627 (QC CT).

12 Moore c. Compagnie Montréal Trust, 1988 CanLII 995 (QC CA).

13 Commission des normes du travail c. IEC Holden inc., préc., note 4.

14 Atwater Badminton and Squash Club Inc. c. Morgan, 2014 QCCA 998; Vissa c. AECOM Consultants Inc., 2017 QCCS 1818.

15Atwater Badminton and Squash Club Inc. c. Morgan, préc., note 14.

16 Imam c. École polytechnique de Montréal, 1990 CanLII 10748 (QC CT).

17 Art. 124 LNT.

18 Leduc c. Montréal (Ville de), 2014 QCCA 876.

19 Westmount (Ville de) c. Commission des relations du travail, 2016 QCCS 1332.

20 Art. 1517, 2086 et 2091 C.c.Q.