Le pouvoir d’appeler à la Cour suprême du Canada


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La Cour suprême du Canada est la plus haute instance du système judiciaire canadien dont la création fut autorisée par la Loi constitutionnelle de 1867. Constituant l’ultime recours juridique pour toutes les décisions judiciaires du Canada relevant de tous les domaines du droit, celle-ci entend les appels des Cours d’appel provinciales ou territoriales et de la Cour d’appel fédérale. D’ailleurs, au Québec, la Cour d’appel du Québec est la juridiction d’appel de dernier ressort et elle a été crée en 1849.

Cette Cour remplit une fonction unique : outre le pouvoir de trancher toute question relative à des décisions de juridictions inférieures concernant des particuliers, elle peut aussi être sollicitée par le gouverneur en conseil pour donner son opinion sur des questions constitutionnelles fondamentales tel que le mariage entre les personnes du même sexe. Cette compétence particulière découle de l’article 53 de la Loi sur la Cour suprême, qui prévoit, entre autres :

« 53. (1) Le gouverneur en conseil peut soumettre au jugement de la Cour toute question importante de droit ou de fait touchant :

a) l’interprétation des Lois constitutionnelles;

b) la constitutionnalité ou l’interprétation d’un texte législatif fédéral ou provincial;

c) la compétence d’appel en matière d’enseignement dévolue au gouverneur en conseil par la Loi constitutionnelle de 1867 ou une autre loi;

d) les pouvoirs du Parlement canadien ou des législatures des provinces, ou de leurs gouvernements respectifs, indépendamment de leur exercice passé, présent ou futur.

(2) Le gouverneur en conseil peut en outre, s’il l’estime indiqué, déférer à la Cour toute question importante de droit ou de fait touchant toute autre matière, que celle-ci soit ou non, se- lon la Cour, du même ordre que les matières énumérées au paragraphe (1). »

Jusqu’en 1933, il était possible d’interjeter appel des décisions en droit criminel de la Cour suprême du Canada devant le Comité judiciaire du Conseil privé au Royaume-Uni. Ce droit d’appel a été aboli en 1949 pour le reste des litiges relevant du reste des domaines du droit, notamment le droit constitutionnel, le droit administratif et le droit privé1.

Dans certains cas, une partie peut interjeter appel de plein droit. Ceci est notamment le cas dans des affaires pénales sérieuses, par exemple lorsqu’un acquittement a été annulé par une cour d’appel provinciale, ou bien dans des affaires où un jugement est rendu par une telle cour et qu’un des juges ait exprimé des motifs dissidents sur une question de droit. En 2013, parmi les 75 appels entendus par la Cour suprême, seulement 16% représentaient des appels de plein droit.

En revanche, dans la majorité des cas, la Cour entend des appels seulement après avoir préalablement accordé une autorisation à cet effet par une formation de trois juges. Cette autorisation est n’est accordée que lorsqu’une question importante pour le public découle du litige ou de sa nature ou bien lorsqu’il y a une question qui comprend des éléments de droit et qui justifie l’intervention de la Cour, notamment parce qu’elle peut potentiellement entraîner des conséquences considérables pour le public. Ainsi, en 2013, 529 demandes d’autorisation d’appel ont été présentées mais uniquement près de 46 autorisations ont été accordées. Donc, moins de 9% de ces demandes ont été accueillies.

Ce qui précède explique pourquoi il est beaucoup plus fréquent d’entendre dans les médias que la Cour suprême a refusé d’entendre des pourvois que le contraire; un exemple courant concerne Guy Turcotte, qui devra subir un nouveau procès après avoir été jugé criminellement non responsable pour cause de troubles mentaux en 20112. De même, dans une cause presqu’aussi médiatisée, la Cour a également refusé d’entendre l’appel du juge à la retraite Jacques Delisle, qui a été trouvé coupable de meurtre prémédité en 2012 et qui devra purger sa peine de prison à vie sans possibilité de libération pendant 25 ans.

Rédigé avec la précieuse collaboration de Madame Marylise Soporan, stagiaire en droit.