Adoption : le chemin vers une famille !


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Avec l’augmentation du nombre d’enfants dans les crèches et les orphelinats, l’État québécois a adopté, en 1924, sa toute première loi en adoption afin de désengorger ces institutions. Bien que la législation à ce sujet a, depuis cette date, subi plusieurs modifications, l’intérêt de l’enfant mis en adoption a toujours été au cœur de ce processus.

De nos jours, le Québec ne reconnaît légalement qu’une seule forme d’adoption, soit l’adoption plénière. Cette forme se traduit par l’effacement définitif de la filiation initiale de l’enfant adopté qui est alors remplacée par la filiation adoptive. En d’autres mots, l’acte de naissance original est remplacé par le nouveau et devient inaccessible par la suite.

En plus de modifier définitivement la filiation de l’enfant, l’adoption au Québec est dite fermée, ce qui signifie qu’elle garantit l’anonymat total de part et d’autre. En effet, suivant le jugement d’adoption, les informations sur la famille d’origine deviennent alors confidentielles sauf dans des cas exceptionnels prévus par la loi, notamment lorsque l’adopté risque un préjudice grave pour sa santé s’il n’obtient pas les renseignements qu’il requiert (article 584 C.c.Q.).

Conditions de l’adoption

Plusieurs conditions doivent être respectées avant que le tribunal accorde l’adoption officielle d’un enfant en faveur d’un requérant. Ces conditions doivent être respectées autant par l’adopté que l’adoptant.

L’article 543 du Code civil du Québec (ci-après la « C.c.Q. ») prévoit que « l’adoption ne peut avoir lieu que dans l’intérêt de l’enfant et aux conditions prévues par la loi ». Plusieurs jugements mentionnent que ces deux exigences sont cumulatives, dont l’arrêt S.P., Re.

a) Intérêt de l’enfant

Tout d’abord, l’adoption ne peut être prononcée que dans l’intérêt de l’enfant. En effet, il est clairement établi que le tribunal doit considérer le meilleur intérêt de l’enfant dès le moment où il doit prendre une décision le concernant. Le meilleur intérêt de celui-ci doit primer tout au long du processus de l’adoption.

Afin de guider les tribunaux, le législateur a adopté l’article 33 C.c.Q. précisant ainsi certains éléments pour bien analyser ce critère.

« 33. Les décisions concernant l’enfant doivent être prises dans son intérêt et dans le respect de ses droits.

Sont pris en considération, outre les besoins moraux, intellectuels, affectifs et physiques de l’enfant, son âge, sa santé, son caractère, son milieu familial et les autres aspects de sa situation. »

b) Conditions prévues par la loi

L’intérêt de l’enfant ne pourrait suffire à lui seul pour qu’un tribunal accepte de rendre un jugement sur l’adoption. Au Québec, le législateur a voulu bien encadrer l’adoption afin qu’il n’y ait aucun abus ou jugement rendu rapidement, sans prendre toutes les considérations nécessaires préalablement. C’est donc pour cette raison que plusieurs autres conditions ont été prévues par le législateur.

Le tribunal, outre l’intérêt de l’enfant, doit s’assurer que l’adoptant soit majeur et apte à exercer tous ses droits (article 546 C.c.Q.).

Au surplus, « l’adoptant doit avoir au minimum dix-huit ans de plus que l’adopté, sauf si ce dernier est l’enfant de son conjoint » (article 547 C.c.Q.). Le tribunal pourra aussi passer outre cette condition s’il s’avère que l’adoption est dans le meilleur intérêt de l’enfant.

La loi prévoit également qu’une demande d’adoption peut être effectuée seule ou conjointement (article 546 C.c.Q.). Lorsqu’elle est faite conjointement, aucune durée minimale de vie commune n’est exigée pour le couple adoptant. De plus, depuis le 24 juin 2002, il est possible pour deux adoptants de même sexe d’effectuer une demande d’adoption conjointe (articles 578.1 et 115 C.c.Q.).

c) Consentement à l’adoption

Consentement de l’enfant

Selon l’âge de l’enfant adopté, le tribunal devra prendre en considération son consentement. En effet, l’adopté âgé d’au moins 10 ans doit consentir à son adoption. Dans le cas d’un refus de sa part, le tribunal pourra passer outre celui-ci si l’intérêt de l’adopté l’impose (article 549 C.c.Q.). Le tribunal ne pourra pas toutefois aller à l’encontre du refus d’un enfant âgé de 14 ans et plus (article 550 C.c.Q).

Consentement des père, mère ou tuteur

Les père et mère biologiques de l’enfant, lorsque la filiation est établie, ou son tuteur doivent aussi donner leur accord à l’adoption. Lorsque la filiation est établie à l’égard d’un parent uniquement, le consentement de ce dernier suffira (articles 544 et 551 C.c.Q.).

Ce consentement doit être donné devant deux témoins, tel que le prévoit l’article 548 C.c.Q. De plus, le consentement doit être clair. La personne qui le donne doit démontrer qu’elle comprend qu’elle consent à un bris de sa filiation avec l’enfant. Finalement, ce consentement peut être général ou spécial.

Un consentement général signifie qu’il est donné en faveur d’aucune personne précisément. Ce consentement permet à toute personne qui répond aux critères prévus par la loi d’adopter l’enfant.

L’article 32g) de la Loi sur la protection de la jeunesse prévoit toutefois qu’un tel consentement peut être reçu uniquement par le Directeur de la protection de la jeunesse. Par conséquent, les démarches d’adoption doivent débuter par un contact avec cette institution.

Un consentement spécial permet par contre d’éviter de passer par le Directeur de la protection de la jeunesse. En effet, ce consentement est donné en faveur d’une personne spécifique, laquelle doit être incluse dans le groupe de personnes définit à l’article 555 C.c.Q et ne permet l’adoption de l’enfant que par cette personne.

Enfant majeur

Dans le cas de l’adoption d’un enfant majeur, les conditions diffèrent de celles de l’adopté mineur.

En effet, bien que l’intérêt de l’adopté demeure la pierre angulaire d’une demande d’adoption, le tribunal n’a pas besoin d’obtenir le consentement des parents biologiques pour prononcer l’adoption puisque l’enfant ne se trouve plus sous le joug de l’autorité parentale passé la majorité. De plus, il n’est pas nécessaire d’effectuer, dans le cadre de l’adoption d’un enfant majeur, les nombreuses étapes qui sont obligatoires dans le cas d’une telle demande pour un enfant mineur.

L’article 545 C.c.Q devient alors les seuls éléments qui doivent être pris en compte par le tribunal lors de sa prise de décision, lequel se lit comme suit :

«545. Une personne majeure ne peut être adoptée que par ceux qui, alors qu’elle était mineure, remplissaient auprès d’elle le rôle de parent.

Toutefois, le tribunal peut, dans l’intérêt de l’adopté, passer outre à cette exigence.»

L’arrêt St. W., Re mentionne que pour remplir le rôle de parent, l’adoptant doit avoir assuré « tous les soins nécessaires à la vie » auprès de l’enfant.

Dans le cas de l’enfant majeur, le respect des conclusions susmentionnées est suffisant pour que l’adoption soit accordée. Dans le cas de l’enfant mineur, l’adoptant devra, suivant le respect des conditions, franchir plusieurs étapes judiciaires avant que l’adoption soit officialisée, tel qu’il vous sera expliqué dans un article qui suivra prochainement.